L'évaluation des risques constitue un incontournable de la démarche de prévention. Elle conditionne pour partie son succès. Si cette étape s'avère cruciale, elle se révèle parfois compliquée à mettre en œuvre notamment lorsque le climat de l'entreprise est déjà dégradé. Les explications de Sandrine Guyot, pilote de la thématique « risques psychosociaux » à l'INRS.
Quelles sont les grandes lignes de la démarche de prévention des risques psychosociaux ? En quoi la qualité de l'évaluation est-elle essentielle ?
Les risques psychosociaux (stress, harcèlement, violences...) ont une particularité qui les distingue des autres risques. Ils résultent en effet de l'interaction entre le salarié, son travail, et l'environnement organisationnel et humain dans lequel il l'exerce. Ils sont donc potentiellement présents dans tous les contextes de travail. Malgré cette spécificité, la démarche de prévention des risques psychosociaux (RPS) est en tout point analogue à celle des autres risques professionnels. Il est d'ailleurs utile de rappeler que leur prévention et leur évaluation (au travers de leur transcription dans le document unique) font partie des obligations de l'employeur. La prévention durable des RPS suppose une démarche collective impliquant une réflexion approfondie sur l'organisation du travail. Elle doit être envisagée dans le cadre d'un projet d'entreprise associant l'employeur, les salariés et leurs représentants, les acteurs de la santé au travail (médecin ou infirmier du travail, IPRP...). L'efficacité de la démarche repose en premier lieu sur la capacité de l'entreprise à identifier les facteurs de risques psychosociaux présents dans chaque unité de travail et d'analyser les conditions d'exposition des travailleurs (fréquence, circonstances d'exposition…). La qualité de cette évaluation est essentielle. C'est en effet sur cette base que des actions concrètes pertinentes peuvent être priorisées et mises en place pour prévenir les risques.
Comment réaliser une évaluation objective lorsque la situation dans l'entreprise est déjà dégradée ?
Dans de nombreuses entreprises, la démarche de prévention des risques psychosociaux est parfois mise en place trop tardivement, lorsque les problèmes sont déjà avérés, dans un contexte difficile marqué par une rupture ou un blocage du dialogue social. Dans ces conditions, il est illusoire d'espérer traiter durablement les problèmes sans avoir réamorcé le débat dans l'entreprise autour du travail, et « assaini » la situation. Dans ces situations de crise, il est souvent nécessaire de procéder à un diagnostic approfondi. Le recours à un prestataire extérieur (organisme de prévention, cabinet conseil, consultant…) peut s'avérer indispensable. Le but de cette intervention est d'apporter un regard extérieur afin de clarifier et objectiver la situation et permettre de dépasser les points de conflit et de blocage. Il s'agit d'identifier les problèmes rencontrés par les travailleurs, et d'analyser finement leurs origines en lien avec le travail. Mais l'intervention du consultant doit aussi, et peut-être même surtout, contribuer à réinstaller les conditions d'un dialogue apaisé et constructif entre les différentes parties prenantes. L'employeur, les salariés et leurs représentants doivent donc être pleinement associés à la démarche. Le diagnostic, partagé par tous, peut alors constituer une base solide de débat pour agir sur les situations de travail concrètes qui sont à l'origine des difficultés.
Quelles sont les clés pour pérenniser la démarche de prévention et intégrer efficacement les risques psychosociaux dans le document unique ?
La prévention des risques psychosociaux est un travail au long cours. Si l'évaluation des risques constitue un point crucial, elle ne constitue pas une fin en soi. Sa raison d'être est de permettre la mise en place d'actions concrètes pour lutter contre les facteurs de risques psychosociaux : surcharge de travail, manque d'autonomie, pression temporelle, manque de reconnaissance, imprécision des missions, perte de sens du travail... Les mesures de prévention regroupent le plus souvent un ensemble de mesures sociales, organisationnelles ou techniques qui doivent être définies, construites et priorisées de façon collective. Les priorités d'actions sont à déterminer en fonction du niveau de risque évalué, du caractère d'urgence et de la faisabilité des améliorations à apporter. Il peut s'agir par exemple d'ajuster les objectifs de rendement en tenant compte des aléas de la production, d'anticiper le recours à des ressources supplémentaires en cas d'augmentation importante de la charge de travail, d'alterner les tâches pour éviter la monotonie du travail, d'associer les salariés dans l'organisation ou la modification des tâches, d'éviter la mise en concurrence des salariés en fixant des objectifs collectifs plutôt qu'individuels... Pour pérenniser la démarche, il est également nécessaire de définir des indicateurs de suivi qui permettront de réévaluer régulièrement et de réajuster le plan d'action. De nombreux outils sont aujourd'hui disponibles pour accompagner les entreprises dans la démarche. On peut citer notamment l'outil Faire le point spécialement destiné aux TPE/PME et dont il existe une déclinaison pour le secteur Sanitaire et social ou encore la brochure Évaluer les facteurs de risques psychosociaux : l'outil RPS-DU qui propose des repères méthodologiques et des exemples de pistes pour la définition du plan d'actions.
Napo dans... Le stress au travail ! (DV401)Napo dans... Le stress au travail ! (DV401)
Stress, harcèlement, violences, … Le film d’animation « Napo dans... Le stress au travail ! » (DV 401) aborde la question des risques psychosociaux. Ce nouvel épisode des aventures de Napo dresse un rapide inventaire des situations à risques. Il présente également leurs effets sur la santé des salariés et leur impact sur le fonctionnement général de l’entreprise. Il est avant tout un outil de sensibilisation aux RPS. Le film est ainsi un vecteur idéal pour lancer des discussions au sein des entreprises et initier la réflexion autour des risques psychosociaux entre les différents acteurs concernés.
- Risques psychosociaux
- Outil : Faire le point. Une aide pour évaluer les risques psychosociaux dans les petites entreprises (Outil 37)
- Publication : Risques psychosociaux et document unique. Vos questions, nos réponses (ED 6139)
- Fiches : Outils d'évaluation des risques psychosociaux (publiées dans la revue Références en santé au travail)
Auteur : INRS.