Un règlement intérieur peut-il interdire totalement l'usage de l'alcool dans l'entreprise ?
Selon l'article L 1321-3 du Code du travail, "le règlement intérieur ne peut pas contenir de dispositions contraires aux lois et règlements". Or, l'article R 4428-20 du Code du travail dispose que "aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail". Or, sur le fondement de cet article, certains inspecteurs du travail exigent des entreprises qu'elles retirent de leur règlement intérieur l'article dans lequel elles formulent une interdiction totale de l'alcool dans l'entreprise. Des DRH n'hésitent pas à saisir le tribunal administratif à l'encontre de ces décisions des inspecteurs.
L'inspecteur du travail peut-il exiger le retrait des dispositions prônant l'interdiction totale de l'alcool ?
Il existe très peu de jurisprudence. Dans un très vieil arrêt du 3 octobre 1969, la Cour de cassation admet que l'employeur puisse totalement interdire, dans l'intérêt de l'entreprise, la présence d'alcool. Plus récemment, La Cour administrative d'appel de Bordeaux (décision du 22 décembre 2009, lire ci-dessous) considère que si "l'employeur a la possibilité, lorsque des impératifs de sécurité le justifient, de règlementer la consommation de boissons alcoolisées (y compris le vin, cidre...), il ne peut légalement interdire de manière générale et absolue l'introduction et la consommation de telles boissons, sans méconnaître l'article L. 1321-3 du code du travail". Dans cette affaire, l'interdiction d'introduction de l'alcool ne visait pas les responsables de l'entreprise. Par conséquent, décide la Cour, l'article incriminé du règlement intérieur "ne constitue donc pas une interdiction générale et absolue de consommer les boissons autorisées par la loi"
Une interdiction générale peut-elle être justifiée par l'activité de l'entreprise ?
Une entreprise, fabricant d'engins de chantier, a interdit l'alcool notamment lors des repas. Elle faisait valoir qu'il lui était difficile "de contrôler la bonne application des dispositions du précédent règlement intérieur limitant la consommation pendant les repas, des conséquences de la consommation d'alcool en matière d'hygiène et de sécurité et notamment en matière d'accident du travail, des risques spécifiques liés à l'activité industrielle de la société, de la responsabilité de l'employeur en matière d'hygiène et sécurité tant civile que pénale". La Cour administrative d'appel de Lyon (décision du 8 mars 2011, lire ci-dessous) estime que les exigences de sécurité peuvent justifier une interdiction totale. Mais en l'occurrence, l'interdiction générale "excède, par sa généralité et son caractère absolu, l'étendue des sujétions que l'employeur peut légalement imposer au regard des dispositions précitées et des nécessités de la sécurité ". L'entreprise a été condamnée à payer 1000 € au comité d'entreprise.
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Auteur : Par Dominique Le Roux, actuEL-HSE.
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